Une semaine après la naissance de l’enfant Jésus, l’Église tient à honorer tout particulièrement la Vierge Marie, soulignant ainsi le rôle essentiel de cette jeune femme d’Israël dans l’accomplissement du salut.
Toute l’Église célèbre ainsi sainte Marie sous le vocable de Mère de Dieu. A priori, nous pourrions penser qu’il s’agit là, exclusivement, d’une fête mariale. Mais cette solennité, historiquement, fut d’abord une catéchèse christologique qu’enseignera comme dogme catholique le Concile d’Éphèse en 431. Il s’agissait en effet, contre Nestorius et les ariens, d’affirmer qu’en Jésus, la nature divine et la nature humaine sont indissociablement unies dans la personne du Verbe, dès le premier instant de la conception de Jésus dans le sein de la Vierge.
Ainsi, ce petit enfant dans la crèche n’est pas une personne humaine – comme vous et moi – mais une personne divine, à savoir le Verbe monogène du Père. Une personne divine qui, par-dessus la nature divine qu’il possède en plénitude avec le Père et l’Esprit Saint, revêt, pour ainsi dire, notre nature humaine, composée d’un corps et d’une âme non souillée par le péché originel.
Pouvait-on, dès lors, comme le Peuple de Dieu y était porté par sa piété, appeler Marie : Mère de Dieu (theotokos) ? Ne devait-on pas plutôt la nommer anthropotokos ou christotokos comme le proposait Nestorius ?
Absolument parlant, il est vrai, Marie n’a nullement engendré la nature divine en tant que telle. Celle-ci existe depuis toute éternité. Toutefois, dans la mesure où « celui » qui assume l’âme et le corps de l’enfant que la Vierge a conçu est personnellement Dieu, on peut alors, en effet, affirmer que Marie est réellement la Mère de Dieu. Affirmer que Marie est la Mère de Dieu, c’est donc enseigner, en termes christologiques, que l’union de la nature divine et de la nature humaine, dans le mystère de l’Incarnation, se réalise et s’atteste dans l’unique personne du Verbe et que cette union, dite hypostatique, est absolument indissoluble dès le moment de l’Incarnation. Pour les Pères du Concile d’Éphèse, nier à Marie le titre de Mère de Dieu comportait alors le risque de nier l’union des deux natures du Christ dans la personne du Verbe, ce que confirmera 20 ans plus-tard le Concile de Chalcédoine. Plus simplement encore, la maternité de Marie ne s’exerce pas seulement vis-à-vis de la nature humaine du Christ mais elle s’exerce à l’encontre du Fils de Dieu qui assume la nature humaine. Telle est la réalité du mystère de la maternité divine de Marie. Il s’agit d’une relation entre deux personnes : la Vierge Marie et le Verbe incarné.
Mais la Vierge Marie n’est pas seulement Mère de Dieu. Le Concile Vatican II, dans Lumen Gentium, la nomme également Mère de l’Église et Mère des hommes. Mais là aussi, il convient de bien interpréter ces titres au risque de méconnaître le mystère que ces vocables entendent signifier.
En quel sens, en effet, Marie est-elle Mère de l’Église ? Parle-t-on simplement d’une maternité spirituelle exercée vis-à-vis des disciples de son fils qu’on appelle collectivement « l’Église » ou bien parle-t-on d’un rapport de causalité entre Marie et l’Église, entendue, cette fois, comme une quasi-personne mystique ?
Depuis Paul VI et jusqu’à Benoît XVI, en passant par Lubac, Balthasar ou Journet, les papes n’ont pas hésité à affirmer que Marie était en quelque sorte « la cause exemplaire » de l’Église. C’est-à-dire son modèle exécutif, son prototype… Pour eux, la sainteté de l’Église, sa tendresse, sa bonté, sa miséricorde doivent être perçues comme un reflet de celles de Marie. Quelque chose de la personnalité de Marie a mystérieusement passé dans l’Église qui est le corps mystique du Christ, de la même manière que le corps physique de Jésus comportait inévitablement des caractéristiques biologiques héritées de sa mère Marie. Mais cette interprétation ne fut pas partagée par tous les Pères du Concile, surtout ceux qui, naïvement sans doute, voulaient préserver à tout prix un dialogue œcuménique avec les protestants. En somme, disaient-ils en plaisantant sottement, Marie est « la grand-mère » des chrétiens ou « la belle-mère » de l’Épouse de son fils… En réalité, fermant les yeux sur la grande Tradition théologique de l’Église, ces théologiens voyaient surtout l’Église comme une institution et non comme une quasi-personne mystique, selon la célèbre définition qu’en donnait saint Thomas d’Aquin (ST IIIa, q 48, a 2, ad 1). Aujourd’hui encore, beaucoup ne voient en l’Église qu’une institution séculaire et passent alors à côté du mystère qu’elle représente au regard de la foi…
La maternité spirituelle de Marie, quant à elle, est surtout affirmée dans son titre : Mère des hommes qui là encore, scandalisent les musulmans et les adeptes d’autres religions. Mais si le fiat de Marie fut bien prononcé pour que s’accomplisse le salut des hommes comment ne pas songer, dès lors, que l’intercession de Marie, au Ciel, puisse s’exercer au bénéfice des baptisés, certes, mais également au bénéfice de tous les hommes, afin que ceux-ci puissent être sauvés et parvenir à la connaissance totale de la vérité selon le dessein bienveillant de notre Père céleste ?
Ainsi, dire que Marie exerce une maternité vis-à-vis de tous les hommes, c’est affirmer, pareillement, que sa compassion s’exprime en faveur de tous, qu’ils soient croyants ou pas. De la même manière que Dieu fait lever son soleil pour tous, Marie prie pour tous les hommes, qu’ils soient justes ou injustes. C’est donc cette Mère très aimante que nous honorons chaque 1er janvier. C’est à son intercession miséricordieuse que nous pouvons lui confier cette nouvelle année.
Chers frères et sœurs de Pour l’Unité, à l’aube de cette nouvelle année dont nous ignorons encore quels seront les faits marquants, pour notre vie, notre famille, nos proches, gardons les yeux fixés sur Jésus-Christ, Maître et Seigneur de nos destinées. Soutenus par la prière de Marie, Mère de Dieu, encouragés par son exemple de foi et d’espérance, confions le commencement de cette nouvelle année en offrant au Seigneur notre action de grâces pour le don qu’il nous fait de son Corps et de son Sang. Puisse le Dieu trois fois saint illuminer nos visages pour nous permettre d’aller sans cesse à sa rencontre, dans la foi, l’espérance et la charité.
Que Dieu tout puissant vous bénisse et accomplisse toutes vos prières de bonheur et de santé durant cette nouvelle année de notre pèlerinage terrestre. Portons-nous les uns les autres dans la prière et soutenons-nous dans la joie de voir se manifester bientôt le Règne de Dieu.